
Depuis toujours, Robyn Scott aménage une partie de son salon afin d’en faire son atelier. (Crédit photo : Cécile Antoine-Meyzonnade)
L’attrait pour l’art et les couleurs puissantes se lit sur ses bras, bariolés de tatouages aux motifs puissants, choisis avec soin. Et jusqu’à la pointe de ses cheveux aux teintes violettes. Originaire du Nouveau-Brunswick, Robyn Scott est installée à Yellowknife depuis maintenant 14 ans. Si son activité principale, inscrite sur son curriculum vitae, est l’enseignement de l’anglais au Collège Aurora, la ligne directrice de sa vie n’en est pas moins l’art. L’art sous toutes ses formes, de la peinture à la poésie.
Dernièrement, avec sa plus grande œuvre jamais réalisée, elle a remporté le concours annuel de la couverture de l’annuaire téléphonique de Northwestel. Un caribou devant un coucher de soleil aux tons chatoyants, peint à l’acrylique, cédé à l’entreprise pour une valeur de 3 000 dollars. « C’est la première fois que je fais une pièce pareille, d’habitude je fais des paysages, des oiseaux », détaille la peintre.
Sans connaitre sa technique, à la seule écoute de sa voix, douce et constante, on pourrait naïvement s’imaginer que les teintes pastel seraient celles de prédilection. Pourtant, l’aquarelle ne l’a jamais attirée, lui préférant la gouache ou l’huile, plus franches et puissantes. « Avec ces techniques, je peux faire de multiples couches, m’arrêter pour m’occuper de mes filles, et y revenir plus tard », raconte-t-elle.
Art en continu
Pots d’acrylique, pinceaux et toiles vierges… Son salon, devenu atelier de fortune, se remplit de jour en jour. « Les ateliers à louer en ville sont très chers, donc je me suis habituée à travailler chez moi », confie Robyn Scott.
« J’ai toujours été une personne créative, qui ressent le besoin de construire, de créer quelque chose, se remémore-t-elle. Mais jusqu’à maintenant, je n’avais jamais pensé à en faire une carrière. » Diplôme de professorat en poche, elle sort ses pinceaux entre les cours, fait de ses pauses son quart d’heure d’art.
« J’ai commencé par publier des tableaux sur mes réseaux sociaux seulement pour partager avec mes amis, ma famille. » Au fur et à mesure des publications, les encouragements laissent place à des commandes. Il y a quatre ans maintenant, elle soumet anonymement des œuvres à la galerie Down To Earth. « Ce n’était pas risqué, on ne savait pas que c’était moi ! » Les pièces se vendent comme des petits pains. « J’étais tellement excitée de savoir qu’une de mes peintures puisse se retrouver accrochée chez quelqu’un d’autre ! »
Art des mots
Elle tente également par tous les moyens d’enseigner à ses élèves la créativité et l’amour des mots à travers la langue de Shakespeare. « J’ai toujours voulu que mes élèves prennent des risques, fassent des mots une réelle arme ». S’exprimer par le langage ou la peinture, Robyn n’a pas fait le choix.
Car, outre l’art pictural, la trentenaire compte également une autre corde à son arc. Elle est présidente de l’association à but non lucratif Northwords. Cette organisation permet à tous les auteurs, autochtones ou simplement habitants du Nord, de se rencontrer, et surtout, de se faire connaitre du grand public.
Chaque année, elle organise un festival pendant la dernière semaine de mai, du 29 au 31. « Même si tout le monde s’en doutait, je peux maintenant annoncer officiellement qu’il n’aura malheureusement pas lieu », annonce-t-elle. Loin de se laisser abattre, le conseil de l’organisme a décidé de se lancer sur Internet :
« Nous allons avoir des scènes ouvertes de poésie, les gens pourront soumettre des vidéos de trois minutes. Il y aura également des conférences et des tables rondes en direct sur les réseaux. »
Le printemps devait être un renouveau, elle comptait s’installer concrètement comme artiste professionnelle à Yellowknife. Bien que la situation soit contraignante sur plusieurs aspects, elle choisit de voir le positif. Au-delà des murs de son atelier de fortune, Robyn Scott sent un vent de rassemblement souffler : « J’entends les voix d’artistes de partout dans le Nord, je vois leur art, et ils me connaissent à leur tour. »