Il faut bien admettre que comme journaliste, j'ai appris à bien connaître
Roxanne Valade, cette psychologue clinicienne qui veille à la santé mentale
et au bien-être des résidents des T.N.-O. depuis plus de onze ans.
Habituellement, j'évite de dresser un portrait personnel à propos des gens
que je côtoie au Frolic, mais Roxanne a la distinction d'être la psy des
francophones.
Lorsque je l'ai rencontrée dans son appartement pour l'interroger à propos
de sa vie, ses aspirations et surtout de son métier, j'ai constaté qu'elle
avait tout pour mener une vie équilibrée : plantes tropicales, bouquins
intello-spirituels, une sélection musicale variée, plusieurs petits
bibelots (souvenirs de voyages lointains) et, surtout, ce qui est important
dans le Nord, beaucoup de lumière. Après m'avoir accueilli à la porte, elle
me montre son sofa et me prie de me mettre à l'aise pendant qu'elle se
réfugie sur une chaise; heureusement, c'était moi qui prenais les notes
cette journée-là.
« Alors qu'est-ce qu'on fait lorsqu'on est la seule psychologue francophone
aux T.N.-O., Roxanne? »
Elle réfléchit quelques instants avant de donner sa réponse. D'abord, elle
n'est pas simplement là pour la population francophone ; elle dessert
également une clientèle autochtone et anglophone. Elle reçoit en moyenne
cinq à six clients par jour et a entre un et trois patients francophones
réguliers en tout temps. Roxanne se rend de façon régulière dans les
communautés de Fort Smith, Fort Simpson et Hay River pour rencontrer ses
patients et en même temps, ses amis lointains.
« Cela fait beaucoup moins de voyages que lorsque je suis arrivée. À
l'époque il fallait que je me rende dans les communautés inuites du
Nunavut. Je voyageais une semaine sur trois à l'extérieur de Yellowknife.
Les déplacements exigeaient beaucoup d'énergie », a-t-elle souligné.
Pelly Bay est une communauté qui l'a certainement marquée. Les gens
achetaient l'équivalent d'une année d'équipement et de nourriture avant de
les faire livrer par barge. Elle était étonnée qu'un livre de recettes ait
été conçu pour les commandes par barge.
Elle était surprise par l'isolement des communautés, la noirceur et le vent
violent du Nord, cet aquilon qui souffle sans cesse à son arrivée.
L'humilité est une leçon que cette Franco-ontarienne a apprise en vivant
aux T.N.-O.
« J'ai bâti des liens qui dureront le restant de mes jours depuis mon
arrivée, même avec ceux qui ont quitté le Nord. Dans le passé, je
m'impliquais beaucoup en faisant du bénévolat, de la radio et du théâtre.
Aujourd'hui, j'essaie de développer un amour pour l'activité physique ».
C'est d'ailleurs son obligation de se rendre à une partie de balle molle de
classe « D » qui a mis un terme à notre entrevue. Sinon, nous nous serions
sans doute retrouvés au gymnase pour lever des poids et haltères.
Enfin, je réalise que notre interview divague encore sur les conversations
que nous entretenons lorsque nous nous rencontrons à des fins amicales. Je
songe à reformuler une question appropriée concernant la tâche que je dois
remplir.
« Mais Roxanne, tu dois certainement connaître certains de tes clients
avant de les rencontrer professionnellement ? »
« En effet, c'est inévitable lorsqu'on vit dans une communauté aussi petite
que Yellowknife. Lorsque cela survient, je deviens très consciente de mon
souci d'objectivité. Parfois je prends connaissance des problèmes de
certains individus par le biais des médias avant même qu'ils se présentent
dans mon bureau ».
« Lorsque je connais la personne, j'essaie de mettre de côté mes
expériences et mes préjugés concernant la personne et je tente à tout prix
d'être objective. Je demande toujours à mes patients s'ils sont mal à
l'aise à cause de cette relation particulière ».
Roxanne affirme que certains patients choisissent parfois de consulter
d'autres psychologues par l'intermédiaire d'un interprète, ou qu'ils
préfèrent simplement se faire servir en anglais que dans leur langue
maternelle. Pour elle, tout ce qui compte est que la qualité de vie mentale
et spirituelle des patients s'améliore.
Elle ne travaille pas simplement avec des individus, mais également avec
des couples en thérapie conjugale et des familles. À l'automne, elle se
propose même de faire de la thérapie de groupe.
Toute personne ayant besoin de consultation ou d'information peut la
rejoindre au numéro suivant à la clinique externe de santé mentale de
l'hôpital régional Stanton : (867) 873-7042. Elle travaille également à son
compte pour Northstar, mais n'a pas encore de numéro de téléphone.
Roxanne se fera également un plaisir de vous donner le secret pour perdre
14 livres et vivre heureux et en bonne santé à 41 ans.